Lors de la 2ème journée de formation, Jacques Rodde est revenu sur la notion de développement du pouvoir d’agir. Jacques Rodde est directeur du centre social Village d’Aunis. Il a participé à la formation de Yann Le Bossé en 2014-2015. Il s’appuie largement sur le propos du chercheur lors de son intervention.
Yann Le Bossé affirme que l’approche développement du pouvoir d’agir (DPA) est un outil puissant, qui peut changer le monde. La question est celle de la transformation sociale1. On part du principe que si on arrive à se changer soi, à changer ce qui se vit avec les habitants, c’est une manière de changer le monde. La question clé, c’est de dire qu’avec le DPA, on accompagne, fondamentalement : on va prendre comme principe qu’on ne va pas faire à la place des gens mais qu’on va accompagner les gens à développer leur pouvoir d’agir. Et c’est la volonté de transformation sociale qui va nous guider. L’autonomie de l’enfant et de la participation ne peut être inscrite dans une démarche DPA, que dans la mesure où elle s’inscrit dans le cadre d’une transformation sociale.
On entend par exemple dire « les jeunes, on ne peut plus rien leur dire ; qu’ils sont toujours « derrière l’écran ». On voit une forme d’individualisme et de repli, avec moins de
transmission entre les générations. Souvent dans un centre social, on accompagne cette scission, voire même on l’accentue : programmation et segmentation des âges, des secteurs. On peut changer d’échelle et regarder de très haut. Quel est mon impact, par-delà le centre social ? Quel impact dans la famille ? Quel impact dans un territoire, un quartier, un village ? Quel impact dans la vie publique, citoyenne ? Si on ne se pose pas ces questions, on n’est pas dans la transformation sociale, on est dans l’autonomie de l’enfant, dans l’éducation, voire, dans l’émancipation.
On peut se poser la question pour nous-mêmes : Qu’est-ce qui a été le ressors de mes engagements, dans ma vie personnelle ou professionnelle ? Il est souvent nécessaire de le
percevoir pour soi et de décrypter le pourquoi on s’implique…On est ici dans la motivation et les enjeux personnels : cette clé, nous en avons besoin. Il s’agit souvent d’un plaisir ou d’un dérangement, qu’il s’agit de régler.
C’est souvent la résolution d’un problème qui va être mobilisatrice.
Comment, à travers des échanges, à travers des observations, on va chercher les enjeux chez les habitants, chez les enfants ?
Et la clé, c’est d’accompagner et non de faire à la place d’une personne ou d’un groupe. Il s’agit d’accompagner la résolution.
Quand quelqu’un à un problème, on postule que d’autres ont également ce problème ou partagent les préoccupations, les vues de cette personne. Il s’agit alors de les trouver, des les agréger.
Permettre et favoriser l’expression, isoler les facteurs de mobilisations, les enjeux et élaborer avec les gens, problématiser (ce qui permet de voir quel est véritablement le
problème, derrière le problème apparent) et chercher – ici et maintenant – des actes à poser, vers la résolution du problème, ne serait-ce qu’un petit pas.
Il s’agit de considérer aussi les acteurs et ses enjeux. Par exemple : « On ne peut pas travailler avec la CAF… ». On peut cependant aller voir Jean-Paul, qui travaille à la CAF, dont
on ne connait pas les conditions de travail. Si on prend le temps de le rencontrer, peut-être trouverons-nous une ouverture, une option, pour finalement faire quelque chose…
Quand on a abouti, ne serait-ce que le premier pas, il est nécessaire de célébrer, de manière à mesurer le chemin parcouru, produit par les principaux concernés : il y a prise de
conscience des capacités de résolution de l’individu ou du groupe par lui-même.
Cette étape de conscientisation est nécessaire et vient valider le processus du DPA : il faut que les gens prennent conscience, par eux-mêmes, de leur chemin, pour venir valider la
capacité qui devient alors opérante, acquise.
Les deux étapes délicates sont, d’après jacques, celles de la « collectivisation » du problème et celle de la conscientisation.
Quand on pratique le DPA, c’est finalement plus simple d’accompagner les enfants et les gens à vivre ce qu’ils « ont à vivre » plutôt que transmettre ce que l’on sait, ce que l’on croit, ce qui est la position habituelle.
1. On fait là un pas de côté pour sortir de la question de la participation et de « l’agir » de Tony Lainé.
©Photo de Yann Le Bossé : Fédération des centres sociaux de France