XII. L’auto-éducation de l’éducateur
Korczak ne partageait pas l’opinion traditionnelle selon laquelle les enfants ne peuvent être éduqués que par des adultes, donc par des éducateurs. Il n’a cessé de défendre le point de vue que la matière de l’éducation ce sont les effets réciproques qu’ont les uns sur les autres des humains égaux en droit, l’influence qu’exerce tout homme sur les autres hommes, l’enfant sur l’adulte mais aussi l’adulte sur l’enfant.
On ne comprend pas les autres hommes (enfants), on ne les transforme pas si l’on ne se transforme pas soi-même, si l’on ne travaille pas sur soi et si l’on ne corrige pas sa propre posture, ses propres attitudes. Un homme qui n’est pas capable de cela ne peut devenir éducateur. Pour éduquer les autres, il faut se remodeler, renoncer aux préjugés, aux bouffonneries et à l’autorité que confère le service. À cette condition seulement les enfants pourront se développer à notre contact puisant sans limites dans notre expérience et dans notre sagesse. Pour notre part, nous aurons le sentiment qu’en commun avec les enfants nous bâtissons un nouveau modèle de vie et d’éducation, qu’il nous est donné de rehausser à un autre niveau la nature et les relations entre les hommes.Si, du temps de Korczak, ceci n’était nullement une utopie, pourquoi faudrait-il le voir aujourd’hui autrement ?
Ancien directeur de l’Institut [national] de pédagogie
Ce texte est un extrait d’une conférence du professeur Lewin donnée en Allemagne en 1987.